Le goût du baiser de Camille Emmanuelle

Quatrième de couverture

Cette année de première s’annonce particulière pour Aurore : à la suite d’un accident de vélo, elle vient de perdre le goût et l’odorat.
Au lycée, elle fait tout pour cacher ce handicap, invisible aux yeux des autres. Mais en réalité ce trouve s’avère plus envahissant que prévu, surtout quand Antoine, un garçon sur lequel elle fantasme depuis des mois, semble enfin s’intéresser à elle.
Privée des deux sens sur cinq, Aurore a soudain le sentiment que son propre corps lui est étranger. Comment poursuivre une vie sexuelle à peine amorcée quand on ne sent rien, pas même sa propre odeur ?

Mon avis

Après avoir lu Une sirène de poche, je me suis lancé dans Le goût du baiser. C’est un roman qui m’a pas mal intrigué. Il faut dire que c’est le premier livre d’une nouvelle collection au sein de la maison d’édition Thierry Magnier : L’Ardeur. Une collection à vocation « érotique » pour les adolescents ou du moins de parler de sexualité sans tabou. J’avoue que lorsqu’on a reçu ce livre au boulot et que j’ai su de quoi ça allait parler, j’étais assez sceptique. Mais j’étais quand même intrigué, donc pour m’en faire une idée, il fallait que je le lise.

Le problème est qu’en librairie on a tellement de choses à lire que l’on fait parfois l’impasse sur certain. Ce qui a été le cas pour celui-ci, mais je n’ai pas oublié ce titre. En récupérant quelques SP du boulot, j’ai donc fini par le prendre et le « déterre » quelque peu (il est sorti en octobre 2019) pour enfin le découvrir.

Et j’avoue que cela a été une très bonne surprise pour moi. Je ne pensais pas adhérer à ce point. C’est une très bonne histoire, même si trop courte à mon goût (je vous dirai pourquoi), j’ai bien aimé la manière dont la sexualité était abordée ici.

Je ne ferai pas de résumé de l’histoire, la 4e de couverture étant suffisamment explicite pour savoir de quoi il s’agit d’autant que les événements arrivent assez vite pour s’en rendre compte. L’écriture de l’autrice est très agréable à lire et fluide de sorte que l’on rentre rapidement dans l’histoire qui est vraiment bonne et bien menée. En soi, elle est assez simple, on suit le quotidien d’une adolescente, jusqu’à cet accident, qui surgit très tôt dans l’histoire et qui va lui faire perdre deux sens : le goût et l’odorat.

On suit le point de vue d’Aurore, on est donc dans sa tête, dans son corps, au plus près d’elle pour suivre ce nouveau quotidien après son accident. Cet aspect-là était vraiment intéressant car on n’imagine pas tous les problèmes que ça peut engendrer de perdre ces deux sens, le goût et l’odorat. Tout ce qu’elle mange n’a plus aucune saveur, elle ne ressent plus que des textures, même si certaines choses, comme tout ce qui est très salé, elle le ressent un peu. Quant aux odeurs, elle imagine toujours qu’elle pue, un problème que l’on connaît bien à l’adolescence… mais difficile au quotidien si on n’est pas capable de s’en rendre compte. Toute cette partie-là était intéressante et donne une autre dimension à l’histoire, car elle n’est plus totalement maîtresse de son corps.

Ensuite, le cœur de l’histoire, reste l’adolescence, avec les premiers émois amoureux, les premières fois, la sexualité, etc. Et je dois dire que cette partie-là était aussi très bien faite. L’autrice aborde sans tabou beaucoup d’aspects, met à bas aussi certains clichés et explique ça vraiment très bien. Ce n’est pas un manuel, ça reste un roman de fiction, mais c’est un bon moyen pour aborder ce sujet mine de rien, sans avoir pour autant un documentaire en bonne et due forme.

Aurore et sa meilleure amie Bintou aborde ces questions-là assez régulièrement et Bintou, très renseignée sur le sujet « éduque » d’une certaine manière Aurore et lui fait aussi comprendre que certaines situations ne sont pas normales. Par exemple, qu’il n’y a pas à se forcer ni à « soulager » qui que ce soit… Cette discussion-là permet de remettre les points sur les « i ». Aurore va donc être confrontée à de mauvaises expériences mais en ressortira plus forte et saura ce qu’elle veut.

Par la suite, elle fera la rencontre de Valentin, si dans un premier temps, les rapports sont difficiles, petit à petit, ils vont apprendre à se connaître et on va avoir un principe que j’aime bien dans les romances le « enemy to lover », même si en soi, ils n’étaient pas vraiment ennemis au sens strict du terme, mais il est vrai que la rencontre était un peu difficile. Mais ils vont s’apprivoiser et une amitié va naître et aboutir sur quelque chose de plus. Là, on voit clairement un changement dans les rapports, deux êtres sur un même pied d’égalité, où l’on voit le consentement, la découverte de l’autre, à leur propre rythme, etc. Une belle relation en somme et la fin prête à sourire, il y a du changement dans l’air.

Là où j’ai trouvé le livre trop court c’est par rapport à la relation entre Aurore et Valentin. J’ai trouvé que ça allait un chouïa trop vite entre eux. On passe d’une relation un peu compliquée à l’amitié et ensuite à l’amour en très peu de temps. En soi, ce n’est pas dérangeant et ne m’a pas gâché ma lecture, mais j’ai trouvé ça un peu rapide. Après le roman est assez court, il fait à peine plus de 200 pages donc ça paraît plutôt logique. Mais j’ai bien aimé leur histoire, la manière dont ça s’est déroulée, car ça s’est fait de manière naturelle.

Les personnages sont attachants et sympathiques, à commencer par Aurore dont la vie va être chamboulée à plus d’un titre. Mais au cours de cette année, elle va s’affirmer, savoir ce qu’elle veut, même si parfois elle enfreint quelques règles qui pourraient lui poser des problèmes. Mais elle va bien évoluer, apprendre à se connaître, à écouter son cœur et son corps, lui qui lui fait défaut à cause de la perte de deux de ses sens. On peut aisément se reconnaître en elle et se mettre à sa place. Elle est une adolescente comme une autre qui découvre petit à petit sa personnalité, sa sexualité, etc.

Bintou est aussi un personnage important, je l’ai beaucoup aimé. Elle est une vraie amie pour Aurore et parfois, il faut savoir aussi dire la vérité en face. Elle ne mâche pas ses mots, elle n’hésite pas à dire ce qu’elle pense et c’est elle, en grande partie qui évoque la sexualité avec Aurore et va lui apprendre un certain nombre de choses. Quant à Valentin, il est plutôt adorable, je pense que beaucoup aimerait avoir un petit ami comme ça, Aurore a trouvé une perle rare, ça changera d’Antoine…

En bref, Le goût du baiser est un roman intéressant que j’ai bien apprécié. J’avoue qu’au premier abord, j’avais été assez sceptique quant au concept de la collection mais au final ça aurait été une belle surprise avec ce premier titre. L’intrigue est bonne et bien menée, même si la partie romance est peut-être un chouïa trop précipitée pour moi mais sinon dans l’ensemble, c’était une bonne histoire, très efficace et prenante. Camille Emmanuelle aborde la sexualité avec finesse et sans tabou, mettant à bas certains clichés ou idées reçues. Les personnages sont intéressants et attachants, de quoi passer un bon moment en leur compagnie même s’ils vont vivre des moments difficiles et compliqués. Un roman que je vous invite à découvrir.

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