Prospérine Virgule-Point et la phrase sans fin de Laure Dargelos

Quatrième de couverture

À Demi-Mot, petite bourgade sans histoire reposant sur un manuscrit inachevé, les habitants polissent et réparent les lettres tout au long de l’année. Mais Prospérine Virgule-Point, qui ne fait jamais rien comme les autres, préfère bichonner ses Trompettes à pétales plutôt que de faire fleurir l’empire des points et des virgules.
Tout bascule un beau matin lorsqu’elle découvre un corps à l’intérieur de sa boutique. Accompagnée d’Honoré, un citadin passablement exécrable, et de son frère, champion de plongée littéraire, Prospérine va devoir fouiller parmi les secrets les plus enfouis de la Capitale pour sauver Demi-Mot.
Et si tout était lié à cette mystérieuse phrase sans fin laissée en suspens par l’Auteur ?

Mon avis

Après avoir lu Embrassons-nous sous les étoiles, je me suis lancé dans Prospérine Virgule-Point et la phrase sans fin. Quand j’ai eu vent de cette sortie, j’avoue avoir été intriguée par ce titre, il faut dire que la 4e de couverture a de quoi attiser la curiosité et je dois dire au final que c’est un roman qui m’a bien plu. C’est un univers assez perché, très original mais qui a bien fonctionné pour moi et j’espère qu’il en ira de même pour vous.

Je ne ferai pas de résumé de l’histoire, la 4e de couverture étant suffisamment explicite pour savoir de quoi il s’agit d’autant que les événements arrivent assez vite pour s’en rendre compte. L’écriture de l’autrice est très agréable à lire et fluide de sorte que l’on rentre rapidement et facilement dans l’histoire. même s’il faut l’avouer, c’est un récit assez dense qui ne se lit pas en 5 minutes mais c’est tellement intéressant et prenant que ça n’est pas le moins du monde dérangeant. J’ai pu le savourer et voir les enjeux de cette histoire. Dans le fonds, c’est assez simple et j’avais deviné certaines choses mais pour d’autres, ça a été une vraie surprise et une belle découverte livresque.

L’histoire commence assez simplement, on nous présente les personnages qui vivent dans un petit village où il ne se passe pas grand-chose avec un quotidien assez répétitif et tranquille. Jusqu’au jour où Prospérine découvre le corps d’un des habitants et à partir de là, c’est le point de départ pour une histoire qui va prendre une tournure « plus policière » afin de comprendre ce qui a pu arriver au malheureux mais aussi à différents événements tous aussi étranges les uns que les autres. C’est une vraie enquête que nous suivons aux côtés de Prospérine et Honoré qui se retrouve malgré lui embarqué dans toute cette affaire bien mystérieuse.

L’intrigue est vraiment bonne et bien menée, avec nombres de rebondissements et d’actions si bien que l’on n’a pas le temps de s’ennuyer un seul instant. J’étais assez rapidement captivée par ma lecture me demandant bien où tout cela allait nous mener. À partir d’un moment, j’ai eu quelques soupçons et la grande révélation finale ne l’a pas été pour moi car je m’attendais à découvrir cette identité pour le coupable, mais il y a tellement d’autres éléments que je n’avais pas vu venir que ça a été une vraie surprise pour moi. L’histoire prend une tournure des plus intéressantes et ce, jusqu’à la fin.

L’univers est complètement perché, rien que l’idée qu’il y ait des « gens », des habitants vivant dans les manuscrits et qui sont là pour en prendre soin alors même qu’ils sont délaissés par leur Auteur, c’est assez farfelu et pourtant on y croit totalement. Si on oublie un peu cet aspect, bien qu’il soit difficile de l’oublier car nombres d’éléments nous le rappellent, on pourrait croire qu’on suit vraiment des habitants dans leur petite vie et leur village tranquille jusqu’à ce qu’un incident surgisse et qu’il faille le résoudre.

L’autre aspect intéressant de l’histoire est que l’on voit l’amour des mots de la part de l’autrice. Il y a nombre de références en lien avec l’univers du livre, des jeux de mots (notamment sur les noms de famille qui sont en lien avec leur tâche), une mise en page assez originale et la ponctuation et police ont aussi leur importance. Tout pour nous rappeler que l’on est vraiment au cœur des mots puisque l’univers se trouve être un manuscrit et qu’ils y vivent dedans. Pour tout ça, ça en fait vraiment un roman original à lire, aussi bien dans le fond que la forme et ça permet d’en faire une lecture assez unique en son genre. C’est un roman un peu inclassable, même si le côté « enquête policière » ressort, ça n’est pas un polar au sens strict du terme.

Quant aux personnages, ils sont vraiment sympathiques et attachants, même si dans un premier temps Honoré peut paraître détestable. Lui vient de la Ville, il renie totalement ses attaches à son village natal qu’est Demi-Mot, le cliché du citadin envers les campagnards. Difficile de l’apprécier dans ses conditions, surtout quand on voit la manière dont il traite Prospérine alors qu’elle est la gentillesse incarnnée. On ne peut que s’attacher à elle et l’apprécier donc c’est d’autant plus frustrant de voir la manière dont il la traite. Et pourtant… quand on apprend à le connaître, il finit par nous paraître plus sympathique et comme Prospérine, on l’apprécie petit à petit car il a plutôt un bon fond en vérité, même si elle était un peu (beaucoup) cachée. Mais tout finit par s’expliquer, je vous laisser découvrir tout cela par vous-même.

On reste essentiellement concentré sur ces deux personnages mais d’autres gravitent autour d’eux, le frère de Prospérine va aussi avoir son rôle à jouer, un vrai dictionnaire ambulant, à juste propos puisqu’il en a avalé un quand il était tout petit donc il peut sortir des mots et phrases complexes à tout va. Ce qui lui confère une manière de parler assez étrange et en décalage avec les autres. Mais c’est un personnage intéressant à suivre et qui sera d’une grande aide dans toute cette affaire.

En bref, Prospérine Virgule-Point et la phrase sans fin est un roman original que j’ai pris grand plaisir à découvrir. C’est une histoire efficace dans le genre, assez simple au premier abord mais qui va s’avérer plus complexe et plus intéressante encore qu’elle ne le laissait présager. L’originalité vient de son univers, de l’idée de base, celle de personnages vivant au sein d’un manuscrit pour le maintenir en état mais aussi de sa mise en page qui nous plonge dans une certaine atmosphère. Un moment de lecture assez unique en son genre. L’intrigue est bonne et bien menée, une enquête policière qui va s’avérer plus complexe que prévue mais heureusement que nos deux personnages principaux : Prospérine et Honoré ont de la ressource. Les personnages sont intéressants et attachants, ou du moins pour l’un des deux, le devient à mesure de l’histoire. Une histoire très originale que je vous invite à découvrir si ce n’est pas déjà fait.

Commentaires