Le tourbillon des possibles de Clara Héraut

Quatrième de couverture

Fraîchement diplômée d’un master en cinéma et dans l’attente de trouver un travail dans ce milieu, Léonie retourne chez sa mère à Hardelot. Loin de ses amies, de ses repères et du sentiment de liberté qu’elle chérissait quand elle vivait à Paris.
Pour elle, c’est un retour amer à la case départ même s’il n’est que temporaire. Lorsqu’elle recroise Samuel, avec qui elle a partagé une histoire d’amour l’été de leurs dix-huit ans, elle voit une occasion de se distraire de cette période morose. Pas d’attache, rien de sérieux, puisqu’elle va bientôt repartir… Du moins c’est ce qu’elle croit, car la recherche de travail se révèle plus longue que prévu. En même temps qu’elle trépigne sur la ligne de départ de sa vie d’adulte, Léonie sent monter la peur de voir ses plans s’effondrer. Et le vertige de devoir choisir.

Mon avis

Après avoir lu Revendications magiques, j’avais envie de changer de genre de lecture, raison pour laquelle je me suis lancé dans Le tourbillon des possibles, le dernier roman de Clara Héraut. Elle est une autrice que je lis, sans savoir de quoi parle ses livres tant je la considère comme une valeur sûre. J’ai eu d’énormes coup de cœur pour ses précédents romans, donc j’étais plus qu’impatiente de lire Le tourbillon des possibles qui promettait beaucoup. Si je n’ai pas eu de coup de cœur pour celui-là, il n’en reste pas bon très intéressant à lire, j’ai beaucoup aimé ma lecture.

Je ne ferai pas de résumé de l’histoire, la 4e de couverture étant suffisamment explicite pour savoir de quoi il s’agit d’autant que les événements arrivent assez vite pour savoir de quoi il s’agit. L’écriture de Clara Héraut est toujours un vrai régal, très douce et poétique et surtout très vraie, ce qui rend ses histoires encore plus prenantes et poignantes, car cela touche.

L’intrigue est plutôt bonne et bien menée, cela montre « l’entrée » dans le monde des adultes qui n’est pas toujours le plus évident car il n’y a pas de manuel pour expliquer ce qu’il faut faire, comment avancer et gagner cette fameuse maturité que l’on espère tous atteindre un jour. Mais cela reste très vague et nébuleux dans le sens où il n’y a pas de chemin tout tracer pour savoir comment atteindre ce but.

On voit même que lorsqu’on est plus âgé, on cherche un peu toujours ce chemin, comme la sœur aînée de Léonie, Pauline, qui a bien besoin de sa mère sur certains sujets, ou encore cette mère qui s’est réinventée à plusieurs périodes de sa vie. Il peut y avoir des obstacles, des embûches, des déviations qui font que la vie n’est pas une ligne droite toute tracée. Il est très juste de dire que lorsqu’on est petit, ça l’est : on rentre à l’école, ojn suit les différents établissements : maternelle, primaire, collège, lycée… Mais une fois le lycée finit, il faut déjà savoir dans quelles études s’engager mais lorsque ces dernières sont finies, où faut-il aller ?

C’est ce qu’essaye de répondre Le tourbillon des possibles à travers le parcours de Léonie qui, une fois son master en poche ne sait pas où aller. Elle cherche désespérément un travail parce que c’est ce qu’il convient de faire, mais quel type de travail ? Comment savoir que telle ou telle opportunité sera la bonne ? Comment savoir que tel choix sera le bon ? On n’en sait rien, on est dans le flou, dans ce « tourbillon des possibles » qui justement nous montre qu’il n’y a pas qu’une seule voie possible. Parfois, on peut bifurquer plein de fois avant de trouver sa place, sa voie.

Léonie va donc en faire l’expérience ici et pas uniquement du point de vu professionnel. Durant ses « vacances / recherches d’emploi », elle va devoir retourner chez sa mère et ainsi reprendre contact avec d’anciens amis. Elle va notamment retrouver Samuel, son voisin, celui qui a toujours été amoureux d’elle, celui avec qui elle a pu vivre des choses avant qu’elle ne parte pour Paris pour ses études. Le revoir va être un électrochoc pour elle, car même si le temps a passé, elle se rend compte que leur histoire n’est pas totalement terminée, qu’il suffirait d’un rien pour que cela reprenne.

Mais là encore, le tourbillon des possibles va entrer en jeu et Léonie ne saura plus où donner de la tête, n’est pas sûre des choix qu’elle doit faire. Elle est perdue, indécise, ne sait pas si ça vaut le coup de prendre le risque de vivre quelque chose avec lui alors que son but ultime est de partir pour Paris.

Elle est donc dans l’inconstance perpétuelle, aussi bien personnellement que professionnellement car elle avait un chemin tout tracé en tête mais les plans ont changé, et elle ne sait plus ce qu’elle doit faire. Cette inconstance pourrait déconcerter et montrer une certaine facette de sa personnalité qui n’est pas reluisante et pourtant, d’une certaine manière, j’ai trouvé ça assez juste et logique.

La vingtaine est une période déjà où l’on se cherche, où l’on commence à mettre les pieds « chez les adultes », à devoir prendre des décisions qui auront des conséquences, mais la vingtaine c’est aussi la période où l’on veut encore être dans l’insouciance, comme un enfant / ado, tout en ayant envie d’être pris au sérieux, comme les adultes.

Une ambivalence qui se traduit bien chez Léonie, même si ça la montre parfois sous un jour peu reluisant, comme je l’ai dit. Elle peut paraître égocentrique, car elle a beaucoup de soucis qui la pèse, sans voir ce qui se passe autour d’elle. Mais en même temps, quand on est préoccupé, qu’on est dans cette spirale infernale où l’on doute de tout, que l’on est incertain pour l’avenir, comment vraiment lui en vouloir ? Moi je peux la comprendre mais ça n’en fait pas quelqu’un d’horrible pour autant.

Une personnalité qui pourrait ne pas plaire à tout le monde mais moi j’ai trouvé ça assez vrai et juste. Par ailleurs, au fur et à mesure, on voit une certaine évolution chez Léonie, qui, de ses expériences (plus ou moins heureuse) va prendre conscience de tout ça, que parfois ne pas suivre un chemin droit peut amener tout de mêmes à de belles rencontres / opportunités qui peuvent changer une vie.

Ce sont nos expériences qui nous forgent, de même que nos choix et mieux vaut expérimenter plutôt que regretter, même si le résultat est le même. Au moins, il n’y aura pas cette petite phrase : « Et si… » signe de regret de ce qu’il aurait pu advenir.

La famille de Léonie est très proche d’elle, notamment ses sœurs qui ont 5 ans d’écart, Léonie étant au centre. Ces différences d’âge, permet de voir aussi l’évolution entre celle de 18 ans, celle de 23 ans et celle de 28 ans. Des âges relativement proches et qui pourtant, dans la vie, sont très éloignées les unes des autres. Elles n’ont pas les mêmes envies, ni les mêmes préoccupations, ce pas « vers l’adulte » est en cours, chez chacune d’elle et c’était intéressant de voir les différences entre elles. En tout cas, même si chacune a sa vie et ses projets, elles restent présentes les unes pour les autres et c’était touchant de voir cette fratrie si unie.

Les amies de Léonie sont aussi très présentes et importantes car elles forment un pont entre les différentes « versions » de Léonie, entre celle du passé (lycée) ou celle du présent (études supérieures) et cela permet de mieux cerner celle qu’elle a été et celle qu’elle est. Léonie va renouer avec une ancienne amie perdue de vue lors de ses études à Paris et elle va l’aider à y voir plus clair dans son parcours. Quant à celles de sa vie « présente », à travers elles, on va aussi voir que tout n’est pas simple, qu’elles aussi se posent beaucoup de questions et que la voie à suivre n’est pas toute tracée comme Léonie le pensait.

En bref, Le tourbillon des possibles est un roman que j’étais impatiente de découvrir comme j’ai eu de vrais coup de cœur pour les précédents romans de l’autrice. Si ça n’a pas été le cas cette fois-ci, j’ai quand même beaucoup aimé ma lecture qui était très intéressante et qui aborde des sujets de société pertinents. Clara Héraut évoque ici un moment clé dans une vie, celle après les études, de l’entrée dans le « monde des adultes ». Mais il n’y a pas de mode d’emploi, pas de chemin tout tracé et parfois même, les plans peuvent changer en cours de route et évoluer avec le temps. Léonie va découvrir tout ça, aussi bien sur le plan professionnel que personnel. Tous les chemins mènent à Rome mais souvent, ce qui compte, c’est parfois plus le chemin que la destination car c’est ce qui permet de créer des expériences et de façonner. Tout simplement de vivre… Une très bonne histoire que je vous invite à découvrir car elle interroge beaucoup sur le sens de la vie, tout simplement.

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